L'île aux sorciers

Aventures dans l'archipel d'Ekassan

Lorsque Logart proposa de mettre le cap sur l'île mystérieuse, je savais que nous allions au devant de graves ennuis.

Notre séjour à Smirn avait déjà du être écourté après qu'Athalef ait mis le feu aux bas quartiers de la cité pour créer une diversion et faciliter notre évasion des sombres cachots de l'inquisition draconique. Enfin c'était du passé et nous étions en sécurité sur le bateau d'Athalef - enfin sur le bateau qu'il avait emprunté au port de Smirn le sauvant ainsi des flammes. Mais n'avions nous pas quitté un mal pour trouver un pire ?

L'archipel de Smirnien recelait pourtant bien des merveilles mais l'attention de Logart était focalisée sur cette île sans nom figurant sur notre carte avec un point d'interrogation. D'après des rumeurs dignes de foi (recueillies dans les prestigieuses tavernes du port de Smirn) l'île était peuplée de sorciers et protégée par de terribles ouragans. Il n’en fallait pas plus pour attirer Logart, compagnon en perpétuelle quête du savoir oublié du second âge.

 
Morgandilas, navigateur du Vent des Rêves faute de capitaine digne de ce nom



Peut-être n'aurais-je pas du les accueillir les bras ouverts, mais cela faisait si longtemps que je n'avais vu des gens civilisés. Cela faisait près de 12 ans que je vivais sur cette île maudite où s'affrontaient les Changa et les Tanga deux tribus de sauvages sanguinaires. Les Changa m'avaient adopté après avoir essayé de me tuer. Mais je vais trop vite et peut-être vaut-il mieux commencer au tout début de mon histoire : le naufrage de mon navire, l’Invincible. Je ne dus mon salut qu’à quelques vieux coffres que j’assemblais en radeau de fortune. Après une semaine d’errances, mes provisions d'eau étaient épuisées lorsque j’arrivais en vue d’une île providentielle! Mais à peine avais-je trouvé une source d'eau douce qu'une bande hirsute de sauvages m'attaquait par surprise et m'aurait transpercé de toutes part sans cette cotte de mailles trouvée dans un de mes coffres et que j'avais eu la prudence de revêtir en abordant cette île. Apparemment les Changa étaient plus surpris que moi, car ils n'avaient jamais vu une telle armure (ils ne connaissaient pas le fer). Ils m'ont pris pour un dieu et m’ont accueilli dans leur village. Je leur ai dit que je n'étais qu'un émissaire des dieux car je n'avais aucun pouvoir et ils affirmaient que les dieux venaient les visiter de temps à autres via la brume jaune (une déchirure probablement). Mon armure et mes connaissances militaires permirent aux Changa de prendre un avantage certain sur les Tanga, aussi étais-je considéré dans le village comme un puissant guerrier. Mais j'avais l'impression d’être en cage dans cette île minuscule.

C'est alors que le navire d'une bande d'aventuriers accosta l'île. Ils ne durent qu'à mon intervention d'éviter de se faire massacrer mais ils ne témoignèrent guère de reconnaissance. Ils étaient curieux d'apprendre ce que nous savions des dieux car apparemment ils étaient à leur recherche. Et nous voici partis pour une quête divine qui se révèlera être pour moi une quête des origines. Mais parfois mieux vaut vivre dans l’ignorance…

 
Selnak, émissaire naufragé


Cette partie nous comblait tous. Laniert se révèle le meilleur d’entre nous pour ce genre de mise en scène. Son scénario est classique mais efficace : L’héritière d’un royaume riche et éclairé est enlevée par Klaberntok , affreux  Thanatocien devant les dragons; son père recherche des aventuriers assez téméraires pour aller la délivrer. Nous sommes évidemment intéressés et passons avec brio les épreuves du connétable destinées à tester nos compétences et notre bravoure. D’autres personnes nous accompagnent (membres d’une certaine compagnie des rêves); c’est assez inhabituel mais captivant car ces personnages sont pittoresques et éminemment réalistes, comme animés d’une volonté propre. Lors de l’attaque dans la forêts, la garde noir de Klaberntok  manque de trucider ces étrangers (Laniert aurait dû les concrétiser un plus puissants). Les étrangers hésitent à continuer plus en avant du fait de blessés dans leur rang. Mais pourquoi des créatures issues de l’imagination de Laniert auraient-elles peur ? En dehors du champs de notre imagination, leur existence n’a plus lieu d’être. Une discussion s’ensuit et nous comprenons la vérité : les membres de la compagnie des rêves ne sont pas des chimères mais de véritables hommes venus de l’extérieur. Nous pensions ne jamais plus en rencontrer. Nous abandonnons nos incarnations pour nous regrouper dans l’Alliance et faire le point avec Laniert.

Kahl, drak du 1er cercle


Cruel dilemme ! Tout le savoir du second âge et l’art unique développé par les draks se trouvaient regroupés sur cette île unique en son genre.

Nous avions trouvé les « dieux » : c’étaient de puissants haut-rêvants du second âge, issus de la fameuse cité du Grand Savoir, qui ont été choisis par les dragons et détiennent certains de leurs pouvoirs. Ils sont capables de « concrétiser » leur imagination et s’exercent assidûment à cet art en vivant des aventures imaginaires sur des terres truquées. Leur mue n’est pas encore achevée mais ils présentent déjà quelques aspects lézardoïdes qui les rendent effrayant sous leur aspect naturel (sans l’illusion habituelle qui les fait ressembler à de puissants héros)

Les draks nous ont fait comprendre que nous étions des intrus dans leur terrain de jeu onirique et que leur secret devaient être sauvegardé. Mais que nous n’avions rien à craindre d’eux : ils nous laissaient l’alternative de repartir librement mais après effacement de nos souvenirs des derniers jours ou alors de rester parmi eux pour partager leurs connaissances et leurs jeux mais au prix de notre liberté car nous ne pourrions alors plus jamais quitter l’île.

J’étais tenté d’accepter leur invitation car l’apprentissage de leur art suffirait amplement à m’occuper pour le restant de mon existence, mais je sentais que mes compagnons seraient vite lassés de cette existence sédentaire.

L’appel du voyage l’avait une fois de plus emporté.

Logart, Haut-Rêvant philosphe


Finalement, nous étions sortis indemne de cette tempête, la pire que nous ayons jamais traversée. Si l’île des sorciers existait vraiment, elle était puissamment protégée et tenait à conserver son secret. C’était folie que de persister dans cette quête futile d’une île chimérique dans des eaux aussi tourmentées. Je réussis aisément à convaincre Logart d’abandonner les recherches et de faire voile vers Spasme. Les haut-rêvants n’ont pas encore inventé de sort contre le mal de mer ...

Morgandilas, capitaine du Vent des Rêves satisfait d’avoir évité les pires ennuis